Découvrez les deux lauréat.e.s
du PRIX BIOVIV'ART DES JEUNES AUTEUR.RICE.S
Cette année encore, et pour la 3è fois, BIOVIV’ART a lancé à l’automne 2024 un appel à textes de théâtre en langue française, en lien avec l'écologie et la biodiversité.
Nous avons reçu 14 textes, et le jury en a choisi deux. Leurs autrices ont été invitées à venir sur la scène du festival pour en faire la lecture devant le public le dimanche 27 juillet 2025.
Ce prix nous tient particulièrement à coeur car il permet non seulement de soutenir la création théâtrale, mais aussi de laisser s’exprimer par le biais de l’art le ressenti de la jeune génération sur la crise écologique et ses enjeux.

Découvrez les lauréates
de l'édition 2025 du PRIX BIOVIV'ART

KAMILA-ALICE VOLSTEADT
" J'AI PEUR ! "
" J’AI PEUR ! " est une fable poétique qui s’inspire de la disparition du dodo, oiseau symbole d'extinction causée par les humains. Ce texte frappant et émouvant pointe la domination et le mépris des humains envers les autres êtres vivants non humains. “ J’AI PEUR ! ” interroge la manière dont nous nous lions au
monde. Faut-il renouer avec la sauvagerie ? Mais alors, laquelle ? Et qu’est-ce qu’être civilisé-e, au juste ? Loin de tout angélisme, la pièce cherche à questionner nos idéaux. En effet, peut-on rester intègre et conserver de belles intentions face à ceux qui, sans scrupule, ne craignent ni la laideur ni la destruction ?
Née en 1992, Kamila-Alice Volsteadt est lectrice-correctrice et rédactrice spécialisée dans le sensitivity-reading, et mène en parallèle une pratique artistique pluridisciplinaire. Elle mêle dans sa pratique écriture et performance, arts de la scène et arts visuels. Elle est également militante écologiste aux Amis de la Terre à Rouen et militante queer à Divergenre à Amiens. Sa pratique de l'écriture est le reflet de son rapport furieux au monde.

MARGOT ROGRON
" Seul en scène pour un crabe "
" Seul en scène pour un crabe " traite de la prolifération du crabe royal du Kamtchatka. Ce texte puissant, original, subtil et très bien documenté a le mérite de faire rire tout en mettant en évidence l’impact involontaire de l’homme sur les équilibres naturels. Il s'agit d'un seul en scène pour un crabe royal du Kamtchatka. Un crabe invincible et vorace qui pullule dans les mers du nord de l'Europe. Représentant d'une nouvelle armée rouge, il avance vite. Au bout de ses pinces, il aperçoit les côtes françaises.
En tant qu'artiste-chercheuse, Margot Rogron écrit, interprète, met en scène et en ondes ses propres textes, tout en menant une réflexion théorique interdisciplinaire à la croisée de la philosophie, des sciences et techniques, de la culture et de la littérature russes. En 2017, elle performe son récit ТУНДРА/TOUNDRA au festival universitaire de Nantes, et, entre 2019 et 2021, elle représente son texte Seul en scène pour un crabe.
Découvrez les nominés
de l'édition 2025 du PRIX BIOVIV'ART
CLAIRE FAUGOUIN-VIÉ
et SARAH CLÉMENT
" Planète B "
PAUL NICOLAS
" BATWOMAN "
J'AI PEUR
Kamila-Alice Volsteadt
(Début du texte)
1.
Une île au milieu du Pacifique.
Le bruit des vagues.
Le chant des oiseaux ensuite.
Les cris de non-humains au loin.
La nuit est dense et paisible.
2.
Le matin.
Un soleil radieux réchauffe l’île.
Le bruit d’un bateau accostant au loin.
Le chant d’un marin.
Les cris inhumains du capitaine.
3.
Le pied d’un homme vient pénétrer la scène avec force.
MONSIEUR COLOMBE débarque sur l’île.
MONSIEUR COLOMBE : Tu es découverte !
Il pénètre intégralement.
Il porte de grandes bottes et un fusil.
Il parcourt de long en large la plage.
MONSIEUR COLOMBE : Tu t'appelleras ... Liberté !
Il cueille une fleur au sol.
Il la renifle bruyamment puis la jette pour se diriger ensuite vers une autre fleur.
Il sort un carnet de sa poche et prend des notes.
Il jette un œil derrière lui et voit l’étendue boisée.
Il jette la fleur et s'enfonce dans les bois.
4.
MONSIEUR COLOMBE cherche.
Il retourne la moindre feuille, la moindre branche, le moindre buisson.
Tour à tour, il pointe son fusil.
Derrière lui s’avance une créature dodue dotée d’un grand bec.
Elle est recouverte d’un doux plumage gris comme les pierres.
C’est Dodo.
DODO : Bonjour ! Bienvenue à Pouvana’a !
MONSIEUR COLOMBE sursaute et pointe son fusil sur DODO.
(...)
Seul en scène pour un crabe
Margot Rogron
(Début du texte)
Personnage :
Le Roi des crabes royaux du Kamtchatka
Sur scène : son bureau, son trône, un téléphone.
Voix off :
Sur l'île Mana, terre de Nouvelle-Zélande, Nigel l'oiseau – un fou austral – est tombé amoureux d'une statue oiseau installée là par des scientifiques dans le but d'attirer et d'étudier Nigel et ses congénères. Seul Nigel le fou a daigné se laisser observer sur cette terre lointaine, amoureux transi de l'oiseau de pierre. Se blottissant contre le roc les jours de pluie. Essayant de s'accoupler à tout prix.
Et c'est, sans vie, qu'un jour Nigel a été retrouvé auprès de sa bien-aimée qui n'a même pas frissonné.
L'histoire vraie que vous allez découvrir maintenant ne retrace pas les aventures de Nigel.
Le Roi est de dos, voix de basse.
Vnimanie, vnimanie1, camarades crabes, votre attention à tous est demandée.
Le 35e congrès des crabes royaux du Kamtchatka s'ouvre ce soir, et c'est avec un discours grandiloquent que votre puissant Roi s'apprête à vous dévoiler les prochaines opérations à mener grâce à nos forces rouges armées.
Fier de tenir la barre, et de vous guider toujours plus loin vers le Sud, votre redoutable Roi a su élaborer des tactiques invasives qui font déjà des vagues au-delà de nos territoires conquis. Et ce sont avec des applaudissements et ovations prolongés que nous vous demandons de l'accueillir maintenant.
Le Roi applaudit et ovationne. Il espère que le public en fasse de même.
Musique royale.
Le Roi exécute son entraînement militaire quotidien, autrement appelé krabmaga.
Au bureau, répétition du discours.
Nous sommes l’or rouge. Krasnoe zoloto2.
Nous sommes les crabes royaux du Kamtchatka. Kamtchatskie kraby3.
Nous sommes les crabes de Staline. Kraby Stalina4.
Nous sommes la nouvelle armée rouge et nous avançons rapidement en prenant soin de tout détruire sur notre passage.
BIENTÔT, ÇA VA SENTIR LE CRABE.
(...)




